PORTRAIT

Randy Ménard

Questions pour des personnages intéressants

Voici l’avocat et activiste ‘cadien, Randy Ménard, sur les questions d’origines familiales, la langue française, la politique toxique, et sa spécialité culinaire : le jambalaya !

La Louisiane, Autrement (LLA) : Randy Ménard, natif de la paroisse de Lafayette, amoureux en toutes choses franco-louisianaises, quelles sont vos racines familiales ?

Le premier Ménard dans notre famille qui est arrivé en Louisiane, il est venu vers le milieu du 18e siècle. Il avait 15 ans ; son nom était Louis Ménard. Il est parti de la région de Cognac, Jonzac en France directement pour la Nouvelle-Orléans. Nous descendons aussi des familles Trahan, Duhon, Boudreaux, Baudoin, Benoît, Guidry, et Breaux. Autre que Ménard, c’est tous des Acadiens.

LLA : Pour vous, parler français, on remarque facilement que c’est tout à fait naturel, et d’ailleurs, normal. Est-ce que cela a toujours été le cas chez vous ?

Je parlais français toute ma vie parce que quand j’étais né j’étais un de sept enfants. Mes grands-parents restaient à côté de nous autres et tous parlaient que le français – ça parlait pas un mot d’anglais. Dans le temps c’était pas « cool » d’enseigner le français à tes enfants, ça fait, ma mère avait décidé qu’elle le ferait parce qu’on aurait jamais pu communiquer avec nos grand-parents si on parlait pas le français. Ça fait, c’est toute ma vie que je parlais français. Mais on savait aussi que notre vocabulaire n’était pas grand.

LLA : Le sauvegarde de la langue française fut toujours un combat incessant en Louisiane où l’on entend encore des histoires pitoyables d’enfants punis à l’école publique pour avoir prononcé des mots en français (les années 20 jusqu’aux années 60). Est-ce que ce fut le cas pour vous ?

Quand on était avec des amis qui parlaient français, on parlait en français ; on se servait de la langue et on n’était jamais punis pour ça. J’ai jamais pensé à demander, questionner pourquoi on parlait en français. J’étais né dans 1960 et la plupart des amis entour d’ici parlaient le français aussi.

LLA : Vous êtes un des moteurs principaux derrière l’événement culturel qui s’appelle le Grand Réveil Acadien (GRA), cette manifestation qui encourage une renaissance – un réveil – de la fierté et de la promotion de la langue et la culture françaises des ancêtres. D’où vous venez, où vous en êtes, et où vous allez avec le GMA ?

Le GRA c’est un congrès manière comme le Congrès Mondial Acadien (CMA). Le deuxième CMA, ça a eu lieu dans la Louisiane en 1999, mais il faut toujours avoir le CMA dans le mois d’août et le mois d’août en Louisiane ce n’est pas un bon temps pour avoir un festival dehors parce que ça fait toujours très chaud. Et puis, c’est toujours la saison d’ouragans. En Louisiane on a fait application pour encore avoir le Congrès Mondial Acadien en 2014, mais on n’a pas réussi à l’avoir. En ce moment-là, Ray Trahan a dit, « Mais, ‘garde, on a fait tout cet ouvrage… n’allons pas perdre notre travail ! » Je ne crois pas que le CMA va retourner en Louisiane – puis le prix que ça dépense, c’est comme un million de dollars par jour pour 14 jours – et en Louisiane le gouvernement ne donne pas les fonds pour quelque chose comme ça … pas beaucoup, certainement pas 14 millions dollars, ou neuf million pour neuf jours. Ça fait, Ray a décidé, parce qu’on ne va jamais le ravoir ici en Louisiane, ça fait, allons lancer notre programme à nous-mêmes pour prendre place comme deux ans après chaque CMA. Ça fait, c’est manière comme le CMA mais un peu plus petit que ça, et aujourd’hui ça se passe l’année après le CMA.

LLA : On dit que les stéréotypes sont souvent le résultat de pensées paresseuses … et les Cadiens ne s’en échappent point. Selon vous, quels sont les généralisations qui ressortent en particulier quant à la culture ‘cadienne ?

Les stéréotypes que les Louisianais sont non éduqués ; qu’on se déplace tous en pirogue ; ou bien que les Acadiens sont venus en Louisiane sans culture et simplement pour se laisser assimiler dans la population existante.

LLA : La couleur politique chez vous c’est décidément bleu (parti démocrate). Mais dans une Louisiane aujourd’hui fort conservatrice, est-ce un exercice futile pour quelqu’un qui cherche un équilibre entre les valeurs fondamentaux du point de vue plutôt libéral ?

Mon grand-père, le père à ma mère, a toujours dit que les Républicains sont des représentants des riches, que c’est pas bon pour les gens comme nous. Ça fait, moi j’étais élevé comme Démocrate – et dans le temps, la plupart des gens en Louisiane c’était Démocrate – et quand on a eu l’influx de tous les Américains avec l’industrie de pétrole, c’était l’arrivée des Républicains, et tout le monde dans l’industrie de pétrole, ça votait Républicain, c’était mieux pour eux. Moi, je vote plutôt pour des gens que je crois qui c’est le meilleur candidat, mais aujourd’hui je n’aime pas la politique des Républicains, ça se foute pas mal de les gens, ils sont tous achetés – payés par les grosses compagnies et ça travaille pour eux et personne d’autre. Je déteste leur politique. Mais, oui, la Louisiane avec l’industrie de pétrole c’est un état « rouge sang » et les criminels comme Donald Trump, ça fait, moi, je ne veux pas avoir affaire avec eux, moi.

LLA : Nombreuses sont les fêtes et manifestions culturelles où l’on peut voir Randy Ménard devant son gros chaudron de fonte noir en train de brasser le fameux plat cadien / créole à base de riz, le jambalaya. Voulez-vous nous révéler ce qui fait un bon jambalaya ?

D’habitude je fais un jambalaya avec la palette de porc. Je me sers d’un assaisonnement de qualité « tout usage », une saucisse pur porc, des oignons, piment vert – le tout caramélisé. Avec l’assaisonnement je mets du poudre de feuille de laurier et une base – le vrai ingrédient secret ! Finalement, après de fermer le feu avec un peu de liquide qui reste, je laisse le tout mijoter pour que le jambalaya ne soit pas trop sec.

Propos recueillis par Charles Larroque pour La Louisiane Autrement